mercredi 29 mai 2019

Et si on sortait (vraiment) des sentiers battus



Et si on sortait (vraiment) des sentiers battus


J’écris rarement des billets qui portent à la réflexion (jamais en fait)! Je n’écrirai pas sur un sujet comme le tourisme durable si je ne crois pas le maîtriser parfaitement et plusieurs le font très bien. Ni sur le voyage en solo au féminin parce que pour moi, ç’a toujours coulé de source, je n’ai jamais eu de crainte de sauter le pas et je n’ai jamais rencontré d’obstacle à ce type de voyage (que voulez-vous, personne de mon entourage n’a jamais émis de doute sur l’un de mes voyages en solitaire et je n’en inventerai pas non plus pour faire cool)! Mais le présent sujet me tient trop à cœur pour ne pas y consacrer quelques lignes et je crois, très humblement, bien le connaître. Et c’est aussi une excuse pour vous parler de ma région.

Sortir des sentiers battus ? Impossible, diront certains. Risible, pour d’autres. Existent-ils vraiment encore des sentiers non battus à notre époque ? Je réponds par un énorme OUI! Suffit de se donner la peine!


Les vacances d’été seront là d’ici quelques semaines. Sur vos réseaux sociaux, vous publierez vos photos de Paris, Barcelone ou Bali. Plus près de nous, ce sera Québec, La Malbaie, Percé ou les grands parcs nationaux qui seront à l’honneur. Normal, je plaiderai coupable aussi! Ce n’est quand même pas pour rien si tous ces endroits de la planète sont si courus par les touristes. Ils ont un charme, une aura ou une beauté indéniable. Mais pourtant…

Pourtant, il existe des milliers de villages enchanteurs qui ne demandent pas mieux que de vous accueillir. Leur offre touristique est peut-être plus limitée, néanmoins, on y fait de formidables découvertes bien loin des foules agressantes et des instagrammeurs trop intenses. Ces petites villes, ces petits parcs, ces petits sentiers représentent bien souvent une évasion parfaite dans le calme de la nature.

Pour plusieurs de ces villages occidentaux, le tourisme représente un apport considérable à l’économie locale. Dans ces endroits plus ou moins reculés, les retombées contribuent directement à la vitalité du milieu. Lorsqu’on sort des sentiers battus, on encourage inévitablement des petites entreprises familiales, des artisans qui bossent dur pour se maintenir à flots, des initiatives citoyennes créatives et intéressantes, des organisations dévouées au développement de leur collectivité. Honni ailleurs, ce tourisme ici sert à maintenir les services, les infrastructures sociales ou commerciales, des emplois, l’environnement. Et on y opte presque toujours pour du développement durable parce qu’on reconnaît son importance.

Saint-Didace dans Lanaudière, un exemple de ces petits villages accueillants, prêt à faire la joie des touristes...

... avec son petit parc près de la rivière, ses sentiers pédestres du Mont-Marcil et ses Jardins du Grand-Portage pour amateurs d'horticulture.


Une alternative aux grands parcs

L’association des parcs régionaux du Québec est un exemple concret de ces organismes prônant ces valeurs communautaires. Loin de l’achalandage des grands parcs, ces plus petits parcs proposent des alternatives récréotouristiques exploitées par le secteur municipal et prônant le développement responsable, l’innovation et la collaboration. De nombreux bénévoles ayant simplement à cœur leur région s’occupent de ces parcs. Avec une cinquantaine de membres, offrant activités de plein air et hébergements, vous aurez l’embarras du choix pour l’organisation de vos vacances.

Le Parc Régional de la Chute à Bull à Saint-Côme

Le Parc des Chutes Monte-à-Peine-et-des-Dalles, une régie inter municipale et un autre exemple de ces petits parcs qui méritent la découverte


Une histoire de village

Laissez-moi également vous raconter l’histoire de mon village pour mieux illustrer mon propos. Saint-Gabriel dans Lanaudière fut, au cours des années ’50 jusqu’en 1976, une station balnéaire immensément courue par les touristes de l’Est de l’Amérique du Nord. On y débarquait par milliers en été, sur sa plage, dans ses restaurants, boutiques et salles de spectacle. Tous les grands noms de la chanson québécoise y séjournaient à un moment ou l’autre de leur carrière. Les plus vieux racontent souvent qu’il y avait des files d’attente, tous les jours de l’été, devant tous les bars et restaurants de la place. L’hiver, ses sentiers de ski et de motoneige étaient largement fréquentés. Et c’est tout le grand secteur Brandon qui en profitait. Puis, à l’hiver 1976, s’abat sur la ville une épidémie de fièvre typhoïde (qui, on l’apprit au printemps, fut causée par l’eau bue par les résidents). Bien sûr, on remédia alors à la situation et plus jamais le problème ne se représenta mais le mal était fait et les touristes prirent peur. Les saisons qui suivirent furent dorénavant boudés, la plage désertée, plusieurs commerces fermèrent leurs portes ou eurent bien de la difficulté à survivre pendant quelques décennies. Et conséquemment, la population s’est appauvrie et des services ont disparus.

Image d'archive tirée d'une carte postale: la plage de Ville Saint-Gabriel au cours des années '60

Image d'archive: L'arrivée des skieurs à la gare de Saint-Gabriel au début des années '40

Ici, le tourisme est véritablement primordial à l’économie locale comme bien d’autres petits coins méconnus du pays. Heureusement, depuis quelques années, les gens reviennent tranquillement. Des événements sont créés, les gens du milieu se sont relever les manches pour développer de nouvelles offres. Ici, un charmant vignoble biologique, là, une boutique gourmande de produits du terroir, ici encore, une petite galerie d’art très intéressante et partout autour, l’aménagement de sentiers de randonnée. Mais nous pourrions accueillir une bien plus forte concentration de touristes. Nous les recevons d’ailleurs à bras ouverts tout comme le font tous ces résidents fiers de leur coin du monde, qu’il soit situé au cœur des Laurentides ou au milieu de la savane africaine!

Mais il est difficile de convaincre les gens de venir jusqu’ici et il faut que les mentalités changent dans ce domaine pour qu’une vraie curiosité et l’envie réelle de contribuer au développement des régions «hors des sentiers battus» s’installent en chacun de nous. Lorsque vient le temps de planifier les vacances, Québec, Percé et La Malbaie remportent toujours la faveur. Pourtant, la région a de multiples atouts : son magnifique lac Maskinongé, ses grands espaces en forêt, d’excellentes tables proposées par une nouvelle génération de chefs, des petits producteurs locaux qui s’y installent de plus en plus nombreux. Et surtout, on n’y est pas à l’étroit, on ne bouscule personne pour se trouver un petit coin pour pique-niquer, on ne fait pas la file pour faire une photo des montagnes environnantes et je vous le jure, c’est vraiment beau par ici! Et c’est comme ça dans toutes les campagnes de la province. En prime, on découvre souvent ces régions à moindre coût.

Plage du Lac Maskinongé à Ville Saint-Gabriel

Les sentiers Brandon: pédestres du printemps à l'automne, pour les skieurs et raquetteurs en hiver


Des obstacles à vaincre et une concertation politique

Nous l’avons vu et lu cette semaine, le fédéral a finalement compris l’importance du tourisme pour ces petites communautés rurales et tentera de l’encourager (selon le discours de Mélanie Joly, ministre du tourisme au Conseil des relations internationales de Montréal et l’enveloppe budgétaire de 58,5 millions du dernier budget d'Ottawa). Ça peut paraître peu lorsque distribué à l’ensemble du territoire canadien mais c’est déjà un début.

Évidemment, des problèmes de taille surgiront. D’abord la rareté de l’hébergement pour certains de ces centres éloignés. Chez-moi, les possibilités sont limitées, il faut le dire mais ne sont pas nulles. Ça demande un peu plus de travail de recherche pour le touriste mais parfois, ça nous fait aussi découvrir de petites pépites bien accueillantes et l’expérience devient plus personnalisée. N’est-ce pas ce que toutes les études affirment, que les voyageurs désirent de plus en plus vivre des expériences? Voyager en région en devient une, assurément!

Aussi, n’oublions pas le problème du transport. Nous sommes de plus en plus conscientisés par les effets néfastes du transport sur l’environnement. Le transport en commun devient la principale solution et les gens l’utilisent de plus en plus pour voyager. Toutefois, bien des communautés ne sont pas desservies par un simple système de bus ou de train efficace. Il faut collectivement l’exiger, se convaincre les uns et les autres de sa nécessité et surtout, les adopter.

Mais restons positifs. Si l’on démontre un véritable intérêt pour ces endroits, les investisseurs suivront. Si on le demande, les intervenants se concerteront pour améliorer ces situations.

Les grands espaces des réserves et pourvoiries des régions. Ici, la Réserve faunique Mastigouche à Mandeville


Par ce petit cri du cœur, je souhaite vraiment conscientiser le plus grand nombre à l’importance de voyager en dehors des traditionnels lieux de vacances parce que partout, il y a du beau et du bon.

Et si, cet été, on consacrait une seule fin de semaine à sortir véritablement des sentiers battus, à aller rendre visite à un petit village de région pour encourager son tourisme local, pour ne pas que meurent ses infrastructures, ses productions régionales et sa communauté. On finit tous par faire une différence. Et ne vous inquiétez pas, le wi-fi y existe, vous pourrez donc publier vos magnifiques paysages sauvages et vos assiettes gourmandes sur vos réseaux sociaux!


Vous habitez, vous aussi, un village qui gagnerait à être connu? N’hésitez pas à en parler dans les commentaires ci-dessous et à nous le présenter. Vous piquerez peut-être la curiosité d’un voyageur qui cherche de la nouveauté ou qui se sent concerné par la cause!


Pour découvrir certains de ces petits coins perdus, cliquez sur les liens qui suivent!

- Ornithologie en Mauricie

- Randonnée des Dalles

- Lanaudière en hiver


VOUS AIMEZ? ÉPINGLEZ-MOI!